Comment est née l'École

 


R
appelant les circonstances
qui avaient présidé à la naissance de l’École, le Directeur Paul BAUGAS s’exprimait en ces termes dans son allocution du 20 mai 1934, commémorative du 25e anniversaire de l’établissement :

« Un grand nombre de commerçants et d’industriels ne peuvent suivre d’aussi près qu’il le faudrait la marche de leurs affaires (car) ils n’ont que des notions par trop rudimentaires de la science comptable (mais) surtout parce que dans la difficile et toujours aléatoire carrière commerciale, bien d’autres connaissances sont susceptibles d’augmenter dans une large mesure les chances de succès : d’abord une intelligence aussi complète du milieu économique, certaines notions juridiques, le mécanisme des opérations qui se font dans les bourses de commerce et de valeurs, notamment celui du marché à terme, les opérations de change d’une si grande importance, les langues étrangères et bien d’autres notions. (…) »


Peu de professions exigent un ensemble de connaissances et de qualités aussi variées. On ne devrait jamais, en effet, se lasser de répéter que celui qui embrasse la carrière commerciale, doit, s’il veut mettre de côté toutes les chances de succès, être à la fois un économiste, un psychologue, un organisateur, un juriste, un calculateur, un financier et un comptable consommé.

« Or ce sont là des connaissances qui (...) doivent être apprises et (...) réclament de l’intelligence et du travail. Malheureusement, dans notre région de l’Ouest, subsiste encore ce préjugé que le premier venu peut s’improviser commerçant et que la pratique amplement suffit. (...) En proclamant la nécessité d’un enseignement commercial méthodique (on) pouvait lutter efficacement contre cette idée fausse, génératrice de tant de déboires et de ruines et servir les intérêts du pays. Ainsi était née l’idée de la création à Angers, dans le cadre de notre Université Catholique, d’un enseignement supérieur des sciences commerciales. (D’ailleurs) les Universités catholiques, à Louvain et à Lille, ainsi qu’à Paris l’École Sainte-Geneviève (...) nous indiquaient la voie (...). Ne pouvait-on pas, même ne devait-on pas suivre leur exemple ? (Une) commission se mit immédiatement au travail (réunissant et étudiant) les programmes de plusieurs écoles importantes, notamment de Paris, du Havre, de Lyon, de Bordeaux, mais estimant que cela n’était pas suffisant, décidait d’envoyer un délégué, votre serviteur, au contact des écoles étrangères d’Anvers, de Bruxelles, et de Cologne où le Directeur l’interpellait en ces termes : « A nos Écoles de Commerce revient le mérite de notre expansion commerciale. Que comptent d’élèves vos rares Écoles spécialisées ? Bien peu. Ici, nous en avons plus de 3000 ! »


La leçon devait porter.

Tout fut arrêté pour que l’École pût commencer son enseignement à la rentrée de 1909, exactement le 4 novembre. Huit étudiants s’engagèrent à suivre l’intégralité du cursus, et 24 autres, certains cours spéciaux en marge de l’École. Le premier inscrit fut Lionel DELAFOY ; il devait devenir, à sa création en 1921, le premier président de l’Association des anciens étudiants.

 

Paul BAUGAS concluait son bilan du premier quart de siècle en soulignant que l’École pouvait désormais soutenir sans rougir la comparaison avec tous les établissements à objet similaire, en précisant que l’enseignement délivré y dépassait même par la nature et le nombre de ses matières, et de beaucoup d’après lui, celui des autres Écoles supérieures de commerce.

Sans nul doute, ces propos de Paul BAUGAS, auraient-ils pu être repris à peu de choses près par tous ses successeurs sans exception.

Toutefois lors de ce discours, profitant de l’occasion qui lui était alors offerte, le Directeur abordait une question dont lui seul semblait mesurer pleinement l’acuité. Il regrettait que l’École n’ait pas procédé à cet égard, à un changement de nom opportun, qui lui eut conféré une identité spécifique, plus en rapport avec sa réputation bien assise d’excellence et la reconnaissance à présent unanime de son prestige.

Ce n’est que deux ans après le départ en retraite de son fondateur en octobre 1943 que « l’ESCA », « l’École Supérieure de Commerce d’Angers », adoptera officiellement le fameux acronyme ESSCA intégrant à son sigle les fameuses « Sciences Commerciales. » Et ce, pour deux raisons que précisait le nouveau Directeur Jacques NEVEU (1941/1952) lors du Conseil de Perfectionnement du 4 décembre 1943 :

« D’abord pour éviter toute confusion avec des écoles de commerce semi-publiques dites « écoles supérieures de commerce reconnues par l’Etat », et ainsi permettre une éventuelle reconnaissance par l’Etat, ce changement de nom étant un préalable obligé, mais également pour se rapprocher de l’ESSEC de l’Institut Catholique de Paris. »

Un accord devait permettre à cette occasion l’intégration directe en deuxième, puis plus tard en 1951, en troisième année d’ESSEC, des tout meilleurs élèves de l’École, désireux de poursuivre leur cursus ; cette convention authentifiant cela va sans dire le sérieux et la qualité de la formation délivrée alors à Angers.

Quoi qu’il en soit, il allait falloir attendre près d’une trentaine d’années en réalité, et la loi sur les marques du 31 décembre 1964, pour que le sigle ESSCA devienne définitivement propriété de l’École en janvier 1971, ceci après un long contentieux judiciaire de quatre ans, avec un établissement parisien de moindre importance qui le lui contestait.

Aujourd’hui l’équivoque n’est plus de mise. L’ESSCA a gagné ses galons de Grande École. Désormais implanté sur quatre sites dans quatre pays, reconnu au niveau national et international, l’établissement est devenu l’École de commerce de référence pour le recrutement post-Baccalauréat. Son rayonnement est incontestable.

Invoquant les mânes de notre père fondateur nous ne pouvons que reprendre ce cri du coeur :

« Nous pouvons et devons être fiers de notre nom, parce qu’à travers lui, c’est la reconnaissance du mérite et du travail réalisé qui s’accomplit. Et à ce titre, je ne doute pas que tous les étudiants à l’avenir auront à cœur de revendiquer cette identité et l’héritage des promotions qui les auront précédés. »