G ... comme Guerres

 

La Promotion 1943-1944

 

De tous les pays belligérants, la France est celui qui aura subi les plus lourdes pertes, avec 10 % de sa population active.

Dans l’Europe entière, la guerre avait détruit les valeurs morales, les hiérarchies sociales, et la stabilité économique. Un monde nouveau s’ébauchait, véritable laboratoire à échelle réelle, particulièrement propice à la réflexion d’étudiants en économie, on s’en doute... Le Traité de Versailles et le krach de Wall-Street en 1929 devaient se révéler les ferments de la conflagration à venir. Le triomphe des idéologies communiste, nazie et fasciste, la terrible guerre d’Espagne et le modèle keynésien appliqué comme remède à la Grande crise qui frappe alors les Etats-Unis, alimentent les débats parmi nos étudiants, on s’en doute, mais également au sein de l’encadrement de l’École.

Si le conflit de 1940 est bref et l’impensable défaite française rapidement consommée, la longue occupation, et son cortège de privations et de difficultés matérielles pèseront lourdement sur la vie quotidienne de nos étudiants.

Rationnement et sous-alimentation sont à l’ordre du jour.

Le manque de chauffage, en particulier durant le terrible hiver 1941, se fait cruellement sentir dans les salles de cours et les chambres. Du fait de l’élévation du coût de la vie, le montant total des dépenses courantes de l’École triple de mars 1942 à mars 1944 passant de 68 343 francs à 197 504 francs.

Le fonctionnement de l’Etablissement pâtit des absences forcées. De nombreux anciens et des professeurs sont prisonniers en Allemagne.

Les effectifs globaux de l’École varient grandement durant ces années noires. En 1939/40, 101 élèves suivent les cours par suite de la présence à Angers d’un certain nombre de réfugiés. En 1940/41, ils ne sont plus que 38 élèves, puis 55 en 1941/42, mais les statistiques remontent à 81 en 1943/44.

L’incertitude du lendemain règne. Simone BOYER (promo 1944) évoque les départs discrets d’élèves réfractaires au STO et les arrestations, dont, dénoncée comme beaucoup, elle fut elle-même la victime.  

 

Les bombardements et leurs dommages collatéraux endeuillent les familles. L’examen final de la promotion 1944 est supprimé après celui d’Angers début juin 1944.

A la libération, trois promotions successives vont porter les noms d’élèves morts au champ d’honneur : Pierre CESBRON de la promo 1938, tué au feu en 1940, patron de la promo 1945-1947. Alain JAUMOUILLE, promo 1933-1935, décédé le 15 novembre 1944 à trente ans durant la campagne d’Alsace au sein de la 1ère Armée de Lattre de Tassigny, patron de la promo 1946-1948. Auguste TIERCELIN, de la même promo 1935, patron de la promo 1947-1949.

Au total treize anciens élèves seront tombés sur les champs de bataille de France ou d’Afrique ou bien ne seront jamais revenus des camps de prisonniers ou de déportation en Allemagne.

Ainsi Claude DELACOUR, promo 1938, prisonnier évadé, disparu au camp de représailles de Gross-Rosen en janvier 1945 à 28 ans et son camarade de promotion et d’infortune, Yves ECHASSERIAUX, prisonnier de guerre également, tué dans un bombardement aérien près d’Ingolstadt, si près de la libération tant attendue.

Sur les douze jeunes hommes de la promo 1938, trois auront donc laissé la vie durant le second conflit mondial. Nos anciens ressentaient douloureusement ces disparitions et souhaitaient perpétuer le souvenir des victimes. Ils étaient des leurs, ils sont des nôtres dans le grand livre de l’École.